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SHÛNYATÂ
(Emmanuel Sorensen)

 

LA VOIE DE LA TRANQUILLITÉ

Souvenirs d’une conscience lucide

Préfacé, présenté et traduit par Patrick Mandala

 

 

 

 

 

 

Extrait « La voie de la tranquillité »

Comment connaître autrui spirituellement et même psychiquement, au-delà du nom et de la forme ? Les ego se révèlent ou se trahissent eux-mêmes à travers leurs efforts, et leurs bouffonneries cessent alors de contenter. Quoi qu’il en soit, les ego ne peuvent partager dans une conscience unifiée. Effort et verbosité appartiennent à la conscience individualiste. Au mieux, les livres ne sont plus les coquilles vides de la sagesse, mais ne sont le plus souvent que l’étalage des sépultures de la conscience égotique. Ceci dit, ce peut être d’intéressants récits de « balbutiements » sur le chemin, mais rarement des révélateurs d’une expérience plus profonde de la simple, vivante Lucidité dans laquelle l’âme est silencieuse dans la nudité de la solitude. Parmi les livres, le plus satisfaisant est le livre mystique de la Nature qui nous enveloppe, et à chacun d’entre nous est présenté à la naissance un exemplaire unique de ce volume sacré relié d’un tissu vital [ flesh-bound volume].
Si l’on est conscient de la véritable communion de l’interdépendance des harmonies jouant sans cesse au-dedans comme au-dehors de nous, alors le besoin de se projeter impatiemment hors de soi pour avoir la vision - vision obscurcie par les sédiments laissés par les désirs de l’ego, par les affirmations des « j’aime » et « je n’aime pas », ou par l’étalage des complexités de sa force -, alors ce besoin cesse de lui-même. Si l’on choisit de se plonger parmi les agitations bruyantes des ego, cela peut être utile pour le seul contraste avec le Silence, et aussi pour se tester soi-même s’il est toutefois possible de connaître là aussi le Silence.
Dans la lucidité unifiante établie et équilibrée de l’Immanence et de la Transcendance, de la Présence et de l’Être, l’ego cesse d’usurper. Dès l’instant où le monde est connu pour n’être qu’un rêve, l’effort pour « devenir » fait place à l’éveil. Quand nous faisons l’expérience du Divin et réalisons notre Soi vivant , notre bavardage cesse et nous vivons tranquillement. « Le temps viendra - et maintenant est - où nous vénèrerons le Divin, ni dans le temple ou dans les grottes, mais dans l’esprit et la vivante réalité » ; à savoir, dans le Silence de la grotte intérieure [guha]. Ni adoration ni culte de la parole, mais une chose sans prix qui ne s’obtient pas par l’effort - laquelle est pure, vivante Lucidité.
Au plus profond de nous est une vigilance consciente de la Source et du Destin, cette vigilance étant une pure réflexion de notre Être véritable. Demeurer conscient de cette Source et de cette Vie, alors que nous entreprenons notre pèlerinage à travers les jungles de l’ « émotionnalisme », les mirages de l’intellectualité, et la désertification des civilisations, impliquent que nous demeurions ouverts pour être guidés par la Lumière de l’intuition. Même quand nous trébuchons dans l’obscurité, égaré par la conscience divisée -, cette Lumière toujours nous guidera.
De l’Éden au Paradis - qui se fera à travers l’illusion temporelle -, nous trébuchons et errons, bien que toujours conduits par la lumière mystique qui brille dans les ténèbres. Alors que nous apprenons lentement à desserrer et à déployer nos ailes « intuitives », nous gagnons aussi de l’assurance en les utilisant avec lucidité. Le moment venu, nous réveillons et trouvons notre Soi dans l’Aube de l’Éternité, ici et maintenant. Nous oublions de nous Souvenir, mais nous nous Souvenons aussi d’oublier. La conscience de l’ego, c’est l’oubli du Soi. Le crépuscule de la Lucidité c’est le véritable Réveil de l’identité consciente avec le Soi « dans la Lumière qui jamais ne fut sur terre ou mer » [Wordsworth] 15 , mais qui est depuis toujours - même si la Lumière de notre Soleil et autres Astres solaires s’effaceront et disparaîtront.
Tranquillement, purement, et silencieusement, nous pouvons être présent à notre Soi même dans le jeu de l’ego et dans les voies imprévisibles de la shakti [shakti-antics], dans la Lumière de la mort et dans les ténèbres de « ce que nous appelons vie ». La Lumière mystique est intérieure, au-dedans de toutes choses et de tous changements ; c’est la véritable correspondance, la « relation » immédiate naturelle. L’esprit mûr n’est pas abusé par les ambitions de l’ego ni les sentimentalités douces-rosées, ni effrayé par la force de la domination ou par les tempêtes psychiques. Aussi se souvient-il de ra-ssembler [re-collect] ses purs souvenirs.


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